Sécurité routière et conséquences humaines de l'accident
Même si l’automatisation de la conduite peut, à terme, réduire les accidents liés à des comportements non adaptés des conducteurs, le chemin est encore long. Les signes de remontée de l’insécurité routière nécessitent de prolonger l’étude fine des causes d’accident et l’analyse des mécanismes lésionnels. Les données sont là encore essentielles pour évaluer les situations et élaborer des solutions. Le Registre du Rhône, créé en 1995, reste encore aujourd'hui un formidable outil au service de la recherche pour assurer le suivi des traumatisés de la route et mieux comprendre le lien entre accidents et traumatismes, comme cela a été recherché dans l’analyse des traumatismes cranio-encéphaliques.
L'analyse des traumatismes craniocéphaliques
Les traumatismes crâniens (TC) représentent l’une des principales causes de décès ou de handicap dans les pays industrialisés. Les accidents de la route sont responsables d’un tiers des traumatismes crâniens toutes gravités confondues (Scholten, 2014) et cette proportion s’élève à la moitié pour les traumatismes crâniens graves (Masson, 2001). La fréquence et la gravité de ces traumatismes ont incité Santé publique France à s’y intéresser et à financer une étude visant à mieux décrire les blessures consécutives aux traumatismes crâniens. Grâce au Registre du Rhône des victimes d’accidents de la circulation routière, mis en place par l’UMRESTTE en 1995, cette étude a pu être menée sur la seule base de données française permettant de disposer d’une description lésionnelle fine quelle que soit la gravité du traumatisme. L’objectif était de dresser un bilan des analyses déjà réalisées sur le Registre et de décrire les victimes de traumatismes crâniens en termes de fréquences, d’incidences, de caractéristiques démographiques, de circonstances, de nature et de gravité des blessures. Parmi les 80 542 victimes enregistrées sur 2005-2014, le Registre a dénombré 4913 traumatismes crâniens. L’incidence moyenne annuelle était de 28,5/100 000 habitants, supérieure chez les hommes (43/100 000 contre 15/100 000 femmes). Les traumatisés crânien étaient principalement automobilistes (36%) puis usagers de deux-roues motorisés (24%), piétons (17%) et cyclistes (17%). Si les traumatismes crâniens des automobilistes ont diminué de moitié depuis 2005, des efforts restent à faire pour les usagers vulnérables. Un rapport a été adressé à Santé publique France et un poster a été accepté au Congrès EuroEpi2018 qui se tiendra à Lyon du 4 au 6 juillet.
DALVAR : Description des Associations entre Lésions chez les Victimes d’Accidents de la Route
En 2017, une seconde exploitation des données du Registre du Rhône a permis de s’intéresser aux lésions subies par les victimes d’accidents de la route. Lorsque les secours arrivent sur les lieux de l’accident, il est important pour eux d’évaluer le plus précisément possible la gravité des lésions subies par chacune des victimes afin d’améliorer leur prise en charge et les orienter vers des services hospitaliers adaptés. Il a été démontré que les profils d’association de lésions sont différents selon les types d’usagers concernés (cycliste, automobiliste, motard ou piéton). Ceci permet à travers l’initiative ciblée DALVAR de préciser certaines consignes de prise en charge des blessés.
Le diagnostic des lésions subies par les victimes d’un accident est délicat car les traumatismes sont le plus souvent fermés (par opposition aux traumatismes subis par les personnes agressées à l’arme blanche par exemple), notamment lorsque des organes internes sont touchés. On peut alors chercher à prédire leur présence en fonction notamment d’autres lésions subies. Une manière d’aborder cette question est de décrire les associations entre les différentes lésions chez ces victimes.
Ces associations peuvent varier en fonction des circonstances de l’accident, et notamment du type d’usager (automobiliste, piéton, cycliste, etc.). Ainsi, pour étudier les associations entre lésions chez les victimes d’accident de la circulation, il semble assez naturel de considérer la population des victimes comme un ensemble de strates définies par les circonstances de l’accident. L’initiative ciblée DALVAR a permis d’estimer simultanément plusieurs modèles graphiques, décrivant chacun les relations d’indépendances conditionnelles parmi un ensemble de variables, sur une strate particulière.
Des résultats préliminaires obtenus à l’aide des données du Registre du Rhône ont permis d’étudier les profils d’associations entre lésions chez des victimes d’accident de la circulation, en fonction du type d’usager : cycliste (vélo), automobiliste (voit), motard (moto) et piéton (piet).
CHUT : mieux comprendre les lésions de la peau pour proposer des aménagements dans la conception des habitacles
Comme on a pu le voir dans les travaux précédents, la qualification des conséquences d’un accident en termes de lésions est très utile. Dans ce même objectif, l’initiative ciblée « CHUT : Caractérisation des Hématomes chez les Usagers des Transports » vise à quantifier les efforts qui sont susceptibles de faire apparaître des ecchymoses ou de générer des hématomes. Elle s’appuie pour cela sur un modèle numérique de la peau. Ces travaux sont menés en vue de développer un outil de prédiction des risques lésionnels pour les blessures légères. CHUT a été portée par le Laboratoire de Biomécanique et Mécanique des Chocs du département TS2 sur la période 2016-2017. L’équipe de recherche se composait de K. Bruyère (DR), M.-C. Chevalier (IR), S. Nicolle (MCF) et M. Ottenio (MCF). Leur objectif : initier des recherches permettant, à terme, de développer un outil de prédiction de risques lésionnels pour les blessures légères, type ecchymoses. À ce jour, aucun outil fiable ne permet de prédire ce type de blessures. Or, ces lésions peuvent être fréquentes chez les usagers des modes de transports doux. Pour déterminer les critères mécaniques justes suffisants à l'apparition d'ecchymoses, un protocole expérimental de compression dynamique a été imaginé sur membre supérieur ex vivo. Une "revascularisation" de l'organe, condition sans laquelle aucune ecchymose ne pourra survenir, a alors été tentée mais n'est pas totalement maîtrisée. Une mise en pression statique est pour l'heure la solution retenue. En parallèle de cette approche expérimentale, un modèle de peau numérique multicouches (derme et hypoderme) avec capillaires a été développé pour simuler localement ce qui se passe lors d'un impact sur cette zone et ainsi déterminer les contraintes/déformations maximales engendrées sur les parois des capillaires. Une campagne de caractérisation mécanique des capillaires isolés est désormais souhaitable pour connaître leur limite à rupture.