Comprendre, évaluer et améliorer les effets sur l’environnement et les populations

La pollution de l’air et le bruit sont les deux principales externalités des transports dont les effets sanitaires sont avérés. Même si des progrès considérables ont été réalisés ces dernières années pour limiter les émissions des véhicules, il reste beaucoup à faire et nos villes sont régulièrement soumises à des pics de pollution.

En matière de pollution, il est important de mieux caractériser celles émises par les véhicules mais également de s’intéresser à leur devenir dans les sols et dans l’eau. Afin d’acquérir une vision partagée de la problématique, des chercheurs issus de plusieurs laboratoires de l’Ifsttar se sont associés à l’occasion d’une action interne d’animation de réseau sur les polluants animée par Mathieu Goriaux et Yao Liu. Cette action a permis de constituer un réseau d’échange sur les méthodes de mesure des polluants dans l’eau, dans l’air et dans le sol. Les résultats majeurs obtenus par les équipes de plusieurs laboratoires et la multiplicité des champs de pollutions investigués ont été présentés lors d’un séminaire organisé le 13 juin 2017 à Nantes.

En matière d’émission de polluants dans l’air, l’Ifsttar a poursuivi son travail de caractérisation des polluants émis par les véhicules, qu’ils soient réglementés ou non. L’Institut a notamment étudié l’impact de la technologie des différents types de motorisation et de la conduite sur l’émission de polluants non règlementés. L’étude EMI 2-4 a par exemple porté sur les émissions de deux-roues et de quadricycles légers (de type voiturettes) jusqu’ici peu règlementés et peu étudiés.

Le devenir de ces polluants fait aussi l’objet de recherches importantes : évolution de la concentration de particules, de HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) et de mercure dans l’air à mesure que l’on s’éloigne de l’infrastructure et dépôt de platine dans l’environnement urbain ainsi que de mercure et de palladium dans les écosystèmes de bord de route. La caractérisation des polluants dans les eaux pluviales en milieu urbain nécessite des recherches sur la méthode de prélèvement et la hiérarchisation de substances de plus en plus nombreuses à analyser. Le développement des jardins urbains sur des terres faiblement polluées par d’anciennes activités pose aussi la question de la caractérisation des polluants dans les sols.

Projet (EMI 2-4) : analyse des émissions de 2-roues et quadricycles motorisés

(ADEME, programme CORTEA)

Les émissions de polluants des deux-roues et quadricycles routiers motorisés sont encore insuffisamment connues et réglementées. Les limites d’émissions polluantes fixées pour leur homologation ont pris du retard, voire étaient absentes pour les voiturettes à motorisation diesel jusqu’en 2017. Ainsi leurs moteurs sont dépourvus de catalyseur, vanne EGR ou filtre à particules.

Le projet EMI 2-4 a permis, d’une part, de mettre à jour les émissions réelles des deux-roues avec de nouvelles données sur des composés non réglementés et, d’autre part, d’évaluer pour la première fois les émissions de polluants des quadricycles légers à motorisation diesel. La mesure des émissions à l’échappement a porté sur trois quadricycles routiers légers (voiturettes) selon deux cycles de conduite réglementaires et un cycle d’usage réel élaboré au LTE, et sur quatre modèles de scooters testés au banc spécifique de l’UTAC-CERAM selon trois cycles de conduite. Pour tous les véhicules, les polluants gazeux - dont de nombreux composés non réglementés – ainsi que les particules en masse et en nombre ont été suivis (composés organiques volatils).

Concernant les deux-roues, l’étude a confirmé que le moteur deux-temps reste extrêmement nocif en termes d’hydrocarbures, ou HC totaux, avec un facteur d’émission à plus de 10 g/km (soit 1 000 fois supérieur à celui d’une voiture essence récente). Certains composés cancérigènes benzène, toluène (plus de 3 g/km) et aldéhydes sont émis en quantités très élevées par ce moteur.

Les « voiturettes » sont également plus polluantes que les voitures diesel actuelles dans les mêmes conditions d’usage urbain : les quantités de CO émises sont 2 à 5 fois supérieures et jusqu’à 14 fois plus élevées pour le modèle à injection directe. Les facteurs multiplicateurs respectifs pour les émissions de HC sont du même ordre. Sans filtre, les trois quadricycles présentent aussi des émissions de particules élevées, équivalentes aux voitures diesel Euro 0 à Euro 2 (1990-1995). L’injection directe n’est meilleure qu’en termes d’émission de NOx, mais avec un ratio moins favorable en NO2, soit la forme la plus nocive de ces oxydes d’azote.

À l’avenir, d’autres évaluations seront nécessaires pour mesurer l’impact des limites réglementaires plus contraignantes entrées en application en 2017 (Euro 4). 

Le bruit est aussi une atteinte majeure à l’environnement. Une récente étude commandée par l’ADEME a chiffré à plus de 20 milliards d’euros par an le coût social dû au bruit des transports. L’action de l’Ifsttar porte depuis plusieurs années sur la mise au point de modèles de prévision du bruit, de son émission à la source et de sa propagation. Plus récemment, des outils d’évaluation ont été développés, en lien notamment avec la réalisation de cartes de l’environnement sonore.  

Test sur voiturette au banc de mesure LTE_img
Test sur voiturette au banc de mesure LTE

NoiseCapture : une application pour cartographier les environnements sonores avec un smartphone

NoiseCapture est développée conjointement avec le CNRS dans le cadre du projet européen ENERGIC-OD cofinancé par le programme GEOPAL. Cette application Android permet de réaliser des mesures géo-localisées de niveaux sonores en milieu extérieur. Les données collectées sont transférées, de manière anonyme, vers un serveur qui agrège les contributions de l'ensemble des utilisateurs sous la forme de cartes. Visibles en temps réel sur un site web spécifique, ces cartes sont le fruit d’analyses acoustiques et géographiques. Si, pour l’instant, elles informent sur l’environnement sonore instantané, les cartes permettront à terme à la population et aux collectivités d’accéder à des indicateurs acoustiques traduisant l'exposition sonore. L’application a donné lieu à plusieurs présentations lors des Assises de la Qualité de l’Environnement Sonore 2017 à Paris.

Projet GRAFIC

ADEME, en collaboration avec l'Université de Cergy-Pontoise, l'Université de Gand, Bruitparif et la Ville de Paris

La mise au point d’outils d’aide à la décision et d’outils permettant une caractérisation des environnements sonores urbains, qui soient cohérents du point de vue qualitatif, est un enjeu majeur. L’objectif du projet GRAFIC était de combiner deux approches novatrices et récentes pour proposer des pistes de réflexion vers une cartographie continue des environnements sonores urbains cohérente du point de vue perceptif et du point de vue physique : la cartographie des niveaux de bruit s’appuyant sur des données mobiles et la caractérisation des environnements sonores du point de vue perceptif.

De nouvelles méthodes de cartographie des niveaux de bruit, basées sur des mesures mobiles géo-référencées, ont récemment vu le jour. Elles ont l’avantage de considérer l’intégralité des sources sonores, de couvrir l’espace avec une très bonne résolution spatiale, et de diminuer les coûts associés à la production des cartes. D’autre part, des travaux récents ont mis en évidence qu’au-delà de la caractérisation des niveaux physiques, il était nécessaire de mettre au point des outils qui s’appuient davantage sur les aspects qualitatifs des environnements sonores, qui ne peuvent être réduits à leur simple dimension énergétique. Finalité : mieux prendre en compte l’exposition et la gêne des personnes face au bruit.

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Carte de bruit interpolée